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Daniel Raffard de Brienne - Page 21

  • Les charismatiques après la fête

    112d336c21d83417612af274f22d6b4e.jpgDans cet ouvrage sur le mouvement charismatique, Daniel Raffard de Brienne démontre les dérives et dangers de cette mouvance chrétienne dont beaucoup parlent et que bien peu connaissent réellement. Sans esprit de dénigrement mais avec parfois de redoutables pointes d'humour, il nous livre une analyse sans concession de cette pratique aujourd'hui fort répandue.

    Dans Monde et Vie de janvier 2002, année de la publication de l'ouvrage, Michèle Reboul en fait une recension très didactique dont l'intérêt demeure entier quelques années après.

    "Daniel Raffard de Brienne intitule son dernier livre parue dans la collection "Objections" des éd. Servir, fondées par l'abbé de Tanouärn, de la Fraternité St Pie X, Les charismatiques après la fête (1). son livre, de vulgarisation, est un résumé simple et clair, sur le sujet et sur l'apparition charismatique de Medjugorje.

    Pourquoi ce titre bien choisi, "Les charismatiques après la fête" ? Parce que les fausses lumières n'éclairent pas et que les charismatiques ont choisi le clinquant, les paillettes et l'extériorisation du sensible, de l'affectif, au détriment de la Vraie Lumière qui ne se fait connaitre que de nuit, dans la nuit de l'âme et des sens. Saint Jean de la Croix disait dans "la nuit obscure" : "Plus la lumière et la clarté de Dieu sont élevées, plus elles sont ténèbres profondes pour l'homme" (cité p.100 dans St Jean de la Croix et la nuit mystique, d'Yvonne Pellé-Douel, coll. Maîtres spirituels, Seuil).

    Les origines du Renouveau charismatique

    Dans ses deux premiers chapitres, "Le Renouveau charismatique face à l'histoire de l'Eglise" et "Le Renouveau charismatique et la mentalité contemporaine", R. de Brienne montre que si le pentecôtisme, dit "catholique" (premier nom du mouvement charismatique) a commencé en 1967, donc après le concile Vatican II (1962-1965), c'est à la fois par réaction et par conséquence naturelle, logique. Le charismatisme est, en effet, une réaction contre ce que R. de Brienne ne craint plus d'appeler "le saccage de la liturgie" (p.23), accompagné par une relativisation des vérités de la foi, une religion "démythifiée, c'est-à-dire débarassée autant qu'il est possible du surnaturel" (p.25). C'est aussi une conséquence logique de la liberté religieuse et de l'oecuménisme prônés au Concile. L'abaissement doctrinal de l'Eglise conciliaire est tel que cela ne la gêne pas du tout - mais lui plaît au contraire - que le charismatisme, le mouvement le plus important de l'Eglise actuelle et le plus loué, avec l'Opus Dei, par Jean-Paul II, provienne non seulement du protestantisme mais d'une déviation de celui-ci : le pentecôtisme, lui-même dérivé du baptisme.

    Car le pentecôtisme a été fondé en 1906 par des baptistes et un pasteur méthodiste, Charles Parham. Il appelle son mouvement "pentecôtisme, car il veut réveiller les dons que l'Esprit Saint a communiqués en plénitude aux apôtres le jour de la Pentecôte. Outre que c'est refuser à Dieu d'être le libre auteur de ses dons, propres à chacun, faire croire qu'il peut y avoir une "nouvelle Pentecôte" comme le voulait Marthe Robin avec Jean XXIII, c'est penser que l'unique Pentecôte était insuffisante, comme sont insuffisants, pour les charismatiques, le baptême et la confirmation, puisqu'il faut les revivifier par le "baptême de l'Exprit".

    Les pentecôtistes pratiquent, comme les protestants, la libre interprétation de la Bible, alors que dans la véritable Eglise, celle d'avant Vatican II, seul le magistère de l'Eglise était garant de la Vérité et donc du sens de la Bible, de la Révélation. Mais ils en diffèrent par leur croyance au "baptême de l'Esprit" qu'ils conçoivent comme une nouvelle Pentecôte et dont la réception est confirmée par différents charismes : don des langues, de guérison, de prophétie, etc.

    Tout commença au début de 1967 où quatre laïcs, dont deux professeurs de la faculté théologique de l'université Duquesne à Pittsburg aux USA, Ralph Keller et Patrick Bourgeois, demandèrent à recevoir par des pentecôtistes, un baptême dans l'Esprit. Ils avaient lu l'année précédente un livre où K. et D. Ranaghan en parlaient (Le retour de l'Esprit), éd. du Cerf, 1974) et crurent, comme ces auteurs, que le baptême dans l'Esprit revivifierait leur vie chrétienne. Ils n'ont pas pensé qu'ils ne pourraient sortir de leur tiédeur qu'en brûlant d'amour de Dieu, qu'en devenant des saints, et que cet amour de Dieu et des autres en Dieu serait vivifié par la prière,la communion, la confession, les oeuvres de miséricorde,la lecture spirituelle, etc.

    Ces catholiques ont donc été demander aux protestants (l'idée ne leur serait jamais venue avant Vatican II !) de leur imposer les mains (geste que fait un évêque en ordonnant un prêtre). Aussitôt ils se sentirent "baignés" du Saint Esprit (selon leur expression qui fit naître celle d'"effusion de l'Esprit") et se mirent à parler en langues. Aussitôt ces laïcs vont imposer les mains à ceux qui le leur demandaient et le mouvement s'étendit, avec une rapidité étonnante, des universités aux couvents et aux paroisses (iln'y en à presque pas qui n'ait son groupe de prière charismatique).

    Il y aurait actuellement 70 millions de charismatiques catholiques dans le monde et 400 millions en tout (avec les nombreuses confessions protestantes ; les orthodoxes ont une trop juste conception du Saint Esprit pour en faire partie). 40 000 charismatiques catholiques sont répartis en France dans une trentaine de communautés, la plus importante étant l'Emmanuel (près de 7000 fidèles avec 140 prêtres), mais aussi "Le Chemin Neuf", très lié au protestantisme, et les Béatitudes, appelé auparavant "Lion de Juda", mouvement plus juif que catholique. Leurs disciples fêtent le sabbat en plus du dimanche, dansent les danses juives des Hassidim, étudient le Talmud, très hostile à Notre Seigneur et à la Sainte Vierge, et les midrachim, commentaires rabbiniques de l'Ecriture.

    Raffard de Brienne signale d'ailleurs dans son chapitre "Les communautés françaises et le Renouveau charismatique" qu'ils se reportent au texte hébreu de la Bible "alors que ce texte a été modifié par les Juifs devant le développement du christianisme" (p.68) (voir à ce sujet son livre La Bible trahie ?) (2). On ne peut pas à la fois croire que le Christ est venu (c'est le dogme de l'Incarnation du Verbe de Dieu) et prier avec les juifs pour demander la venue du Messie. De plus, leur conception du Messie temporel, puissant, à l'opposé de celle des chrétiens pour qui le Messie est le "Serviteur souffrant" d'Isaïe (p.53) "sans beauté ni éclat pour attirer nos regards... objet de mépris, abandonné des hommes... ce sont nos souffrances qu'il portait et nos douleurs dont il était chargé".

    L'effusion de l'Esprit

    Malgré son origine prostestante, le charismatisme, mouvement le plus important de l'Eglise conciliaire, inspirateur de nouvelles communautés (Focolari, Communion et Libération, les Foyers de charité...), pourrait être, peut-on penser, de remettre à l'honneur ce qui, après Vatican II, avait souvent disparu : la direction spirituelle, la confession individuelle, la prière centrée sur l'oraison, l'adoration au Saint Sacrement, le chapelet, etc. Le charismatisme est loué par les autorités ecclésiastiques, car il a permis que de nombreux jeunes, attirés par ce qui est sensible, sensuel et affectif, ne se dévoient pas dans les sectes et ne participent pas  aux courants traditionnels comme ceux de la Fraternité Saint Pie X, rejetée par les évêques, car Mgr Lefebvre était opposé aux déviations de la foi et aux changements désastreux de la liturgie qui se sont imposés dans l'Eglise depuis le Concile : liberté religieuse, oecuménisme, nouvelle messe, nouveaux sacrements...

    Ce qui fait la spécifictié du charismatisme, ce ne sont pas les dévotions traditionnelles qui furent au coeur de l'Eglise bimillénaire et sont des appâts pour attirer ceux qui s'ennuient dans les liturgies de la Parole et dans une Eglise desséchée où il n'y à plus ni mystère ni sacré car l'homme y a remplacé Dieu. Ce qui fait la spécificité, le coeur, du charismatique, c'est l'effusion de l'esprit appelée auparavant "baptême de l'Esprit". Là encore, le changement d'appellation est destiné à occulter la réalité du fait, même si, remarque R. de Brienne, "les deux expressions ne sont pas synonymes [car] le baptême dans l'Esprit, c'est l'acte et l'effusion de l'Esprit, son effet". (p.77)

    Le baptême dans l'Esprit par imposition des mains, apparu à la fin du XIXe siècle, se fait généralement par des laïcs qui l'ont reçu, eux aussi. Il s'agit d'une initiation par des initiés ou d'une transmission du "sacrement du diable" comme disait le P. Catry. René Guénon (1886-1951), gnostique, franc-maçon (33e degré du rite écossais et 90e du rite égyptien de Memphis-Hisraïm) et musulman dans une confrérie soufie (à partir de 1912) et donc connaisseur en initiations, précisait dans ses Aperçus sur l'initiation : "Le rite est toujours efficace quand il est accompli régulièrement. Peu importe que son effet soit immédiat ou différé. Il vaut toujours et ne se renouvelle jamais."

    Le baptême dans l'Esprit, supposé revivifier les grâces du baptême et de la confirmation, réduit l'importance de ces sacrements qui sont uniques car ils agissent "ex opere operato", "par leur puissance" et la vie chrétienne en est le fruit. Ce "baptême" affaiblit aussi le rôle du prêtre au profit des initiateurs, généralement laïcs et de leurs chefs, les bergers, à qui ils doivent une soumission totale, même pour les décisions de la vie familiale (avoir ou non un autre enfant, choix du lieu des vacances, etc.). Et l'effet de ce baptême, l'effusion de l'Esprit, est immédiate ou différée mais elle arrive toujours, comme l'avait observé René Guénon.

    En quoi consiste cette effusion ? En une sensation non seulement sensible mais charnelle de ce qu'ils disent être le Saint Esprit (mais pourrait être l'Esprit du Mal). Au lieu de donner de véritables charismes, c'est-à-dire des grâces (charis = grâce) pour la conversion, la sanctification d'autrui, le bien de l'Eglise, cet "Esprit" produit des effets spectaculaires, inutiles et même souvent nocifs. Le signe principal que le charismatique a bien reçu l'Esprit est, en effet, le chant en langues : c'est une glossolalie, une énonciation involontaire de syllabes dans aucune signification.

    Or jusqu'à l'intrusion du mouvement charismatique dans l'Eglise, ces sons privés de sens n'étient proférés que par les quakers, les méthodistes, les adeptes des "revivals" et... les possédés du démon. D'ailleurs, il est intéressant de constater que certaines personnes, au moment où elles reçoivent le baptême dans l'Esprit, tombent en transe ou bien ont une paix intérieure et un ravissement ineffable. On observe le même effet après la prise de drogues hallucinogènes, tele le LSD, ou dans le cas d'initiations où le démon envoûte l'âme (vaudou, méditation transcendentale...).

    Quant au don des langues, il n'est en rien semblable à celui qu'avaient reçu les apôtres. Ceux-ci comprenaient leurs interlocuteurs et leur parlaient dans leur langue (Actes 2, 4-11) alors que les charismatiques en sont incapables et ne comprennent pas ce qu'ils disent. Ceux qui connaissent les langues rares dans lesquelles s'expriment les charismatiques (l'amahrique, l'araméen, etc.) affirment qu'ils profèrent souvent des blasphèmes alors qu'ils croient louer Notre Seigneur ou la Sainte Vierge. Et en ce qui concerne les prétendus charismes de guérison, R. de Brienne remarque qu'elles "ne font jamais l'objet de contrôles" (p.10).

    Et puis, comment ne pas s'étonner que l'Esprit Saint qui est l'Esprit de Vérité, l'Intelligence même, s'exprime en sons inintelligibles, peu propres à enseigner la foi et à convertir, contrairement au don des langues étrangères reçu par les apôtres ? Et pourquoi l'Esprit Saint produirait-il un effet différent chez l'initié charismatique et chez le baptisé ou confirmé, enfant ou adulte, qui n'entre pas en transe et ne chante pas en langues ? Enfin, n'oublions pas que les mystiques ont toujours mis en garde contre la recherche sensible et parfois quasiment sensuelle des grâces du Saint Esprit.

    Saint Jean de la Croix recommandait : "Que l'âme s'applique, non à ce qui est plus savoureux, mais à ce qui plus insipide ; non à ce qui plaît mais à ce qui déplaît" (Montée du Carmel, Livre I, cha. 13, p.135 dans Y. Pellé-Douël, id). Et Raffard de Brienne cite, p.80, St François de Sales : "Il y à des âmes qui se veulent, à ce qu'elles disent, être conduites par l'Esprit de Dieu, et il leur semble que tout ce qu'elles imaginent sont des inspirations et des mouvements du Saint-Esprit... en quoi elles se trompent fort !" (Les vrais entretiens spirituels, 12e entretien).

    Daniel Raffard de Brienne n'oublie pas le rôle de Marthe Robin dans l'édification des communautés charismatiques et a un très intéressant chapitre sur l'apparition charismatique de Medjugorje qu'il qualifie, fort justement, de "grandiose caricature de Fatima" (p. 111) : message non conformes à la doctrine catholique, en particulier par leur oecuménisme délirant, mensonges répétés des voyants, désobéissance aux évêques et aux deux commissions diocésaines. La première, dirigée par Mgr Franic de 1982 à 1986 et la deuxième, de 1986 à 1990, sous l'autorité de la conférence épiscopale yougoslave, ont toutes deux déclaré qu'"il n'a pas été possible d'établir qu'il s'agisse d'apparitions ou de révélations surnaturelles" (p.119).

    Et le successeur de Mgr Franic, Mgr Perice, remarque : "Il est défendu de prétendre... que Notre-Dame serait apparue ou apparaitraît encore à Medjugorje" (p. 120). R. de Brienne dit, à juste titre, que Medjugorje est "la vitrine du Renouveau charismatique catholique" (p. 121). Or  de même qu'on ne voit pas pourquoi le Saint Esprit aurait accordé des charismes à des catholiques par l'intermédiaire de confessions prostestantes, "étrangères par définition à l'Eglise et donc éloignées de l'unique Vérité" (p. 96), de même pourquoi faudrait-il fonder une nouvelle Eglise, comme si l'Eglise catholique n'était pas celle fondée par Dieu, voulue par Dieu ?

    Michèle Reboul

    (1)  Les charismatiques après la fête, Daniel Raffard de Brienne, éd. Servir, coll. Objections, 2001, 123 p.

    (2) La Bible trahie ?, Daniel Raffard de Brienne, éd. Rémi Perrin. R. de Brienne a fait un additif à ce livre pour contester la Bible Bayard, "Nouvelle mouture de la Bible trahie".

    A lire aussi l'excellent livre de l'abbé Denis Coiffet : Le Renouveau charismatique est-il d'Eglise ? (111 p., NEL)

  • Duquesne diffusion

    Une grande partie des ouvrages de Daniel Raffard de Brienne est disponible chez Duquesne diffusion ou chez SA DPF (Diffusion de la Pensée Française) :

    Duquesne diffusion

  • Les réveils de Papy Grognon

    Contrastant avec les sujets très sérieux qu'il traitait habituellement, Daniel Raffard de Brienne épanchait régulièrement son infatigable humour au travers de billets d'humeur et de chroniques humoristiques.

    Il donna longtemps au Libre Journal, fondé et dirigé par le regretté Serge de Beketch, disparu il y à peu, des chroniques sous le pseudonyme de Séraphin Grigneux. Puis ensuite, ce furent des billets humoristiques publiés sous le titre "Les réveils de Papy Grognon". Nous travaillons à un projet d'édition d'un petit recueil reprenant l'ensemble de ces chroniques.

    Voici, à titre d'exemple, l'une des toutes dernières, sinon la dernière - le travail entrepris sur ses archives et publications nous l'apprendra bientôt - chroniques "Les réveils de Papy Grognon" qu'il rédigea quelques mois avant son décès.

    "Un cauchemar a troublé une hibernation jusque-là paisible. Personne ne semble se préoccuper du premier tour des élections présidentielles. Mais il y à déjà des victimes. On ne sait pas encore qui l'emportera des concubines de la République, ni la Royale, ni Allo-Allo-Marie, à moins que ce soit le mari, un instant délaissé, de Madame Sarkozette.

    Le suspense est insupportable. Des morts jonchent déjà notre sol, baignant dans leur sang. Parmi les plus purs héros, on relève des cadavres, plus grands morts que vivants (selon Henri III). Celui de Pépé Jospinou et aussi celui de l'Atroce-Kahn. Sans oublier la dépouille du dernier représentant de la gens Fabia, cette famille patricienne qui fit la gloire de la Rome antique.

    La dépouille de celui que le Mythe-errant donna à la France, dit-il, comme un tout jeune Premier ministre. Le gamin ne tarda pas à s'illustrer dans une affaire de sang contaminé. Et puis il créa l'impôt sur la fortune dont le Papa Fabius se montra fort mécontent. Il parait même que le Papa décocha une paire de claques au gamin imprudent, qui avait attenté au pécule familial.

    Maintenant, tout est oublié. L'ancien gamin a laissé des fils d'argent se glisser au milieu de la couronne de cheveux qui encercle l'oeuf de Pescha dont la nudité perce les nuages de sa pensée.

    Il ne restera de son gouvernement qu'une seule image. Celle de Fabius en charentaises se rendant à la plus proche boulangerie, pour en rapporter en toute simplicité la baguette de sa petite famille. Non, bien sûr, sans y avoir convoqué une poignée de journalistes et même la télévision."

    Daniel Raffard de Brienne

    Le Libre Journal, n° 399, du 10 février 2007, P.14

  • La Croix coincée entre l'étoile et le croissant

    Parmi les centaines d'articles publiés par Daniel Raffard de Brienne dans des dizaines de périodiques, un certain nombre sont intemporels, comme on dit maintenant. C'est le cas de cet article paru en mars 1991, il y à 17 ans, dans le mensuel Le Choc du mois.

    Les pièges de l'oecuménisme

    La Croix coincée entre l'étoile et le croissant

    L'oecuménisme prôné par l'Eglise depuis Vatican II, a surtout donctionné à sens unique. Le christianisme se retrouve aujourd'hui désarmé face à ses frères ennemis, l'Islam et je Judaïsme, plus virulents que jamais.

    Si l'on veut bien tenir pour négligeable la doctrine catholique, l'oecuménisme ne pose pas trop de problèmes tant que, comme à Assise en 1986, il ne s'agit que de faire poser pour des photos de famille les responsables de toutes les religions, entre deux prières adressées de manière synchrone aux quelques milliers de divinités représentées.

    Les difficultés apparaissent dès que l'Eglise veut dépasser le stade des réunions mondaines. Non pas certes avec le Dalaï Lama ou les sorciers bantous mais avec les frères ennemis des autres "religions du Livre": les juifs et les musulmans.

    L'Eglise multiplie pourtant les concessions unilatérales accordant tout et ne recevant rien en échange. Ainsi alors qu'une grande mosquée se construit à Rome et qu'un cardinal a représenté le pape à la pose de sa première pierre, les soldats venus au secours de l'Arabie Saoudite n'ont pas eu le droit d'y fêter ouvertement Noël et les ambulances qui relèveront leurs morts et leurs blessés ne pourront même par arborer la croix rouge.

    Un vieux contentieux

    Avec les juifs comme avec les musulmans, chque concession de l'Eglise appelle une autre concession de l'Eglise. Et les concessions sont d'autant plus importantes que le contentieux judéo-chrétien est très ancien. Il date de la crucifixion du Christ exigée par les juifs qui, peu après, ont éxécuté eux-mêmes Saint Etienne et saint Jacques. A en croire deux auteurs du IIIe siècle, Tertullien et Commodien, ils auraient été jusqu'à inciter Néron à ordonner en 64 la première grande persécution antichrétienne (1). On retrouve des juifs parmi les bourreaux des chrétiens, "selon leur habitude", précise en 155 le rédacteur du Martyre de Saint Polycarpe.

    Les rabbins du Ie ou IIe siècle avaient ajouté, dans le cors de la grande prière, la Tenhilla, cette phrase : "Et les nazaréens (les chrétiens) et hérétiques, qu'en un instant ils périssent, qu'ils soient effacés du livre des vivants"(2). Un traité de droit civil de la même époque, le Baba mesia, prescrit en cas d'inondation de sauver le prochain et ses biens, de laisser se débrouiller dans l'eau les Goym et les bergers, et de noyer les chrétiens et quelques autres(3).

    Des relations commencées de cette façon ne pouvaient guère se développer de manière vraiment cordiale. On ne résolut d'y remédier qu'à la suite de la dernière guerre. L'occasion semblait d'autant plus propice que l'Eglise en général et Pie XII en particulier, avaient sauvé de nombreux juifs de la persécution ; le grand rabbin de Rome, impressionné, s'en était même converti au catholicisme. Jules Isaac, demi-auteur de la célèbre mais partial Histoire Mallet-Isaac, prit l'affaire en main. Une première réunion, tenue à Seelisberg (Suisse) en 1947, vit les chrétiens se charger de la responsabilité de l'antisémitisme, tandis que les juifs y refusaient de prendre en compte même leurs textes les plus antichrétiens (4). Isaac obtint de Jean XXIII que le Concile Vatican II publierait une déclaration sur les juifs : c'est l'origine de Nostra aetate, adoptée en 1964 après une intervention des B'nai B'rith et qui lavait les juifs de toute responsabilité dans la mort du Christ, en contredisant tranquillement ainsi le récit des Evangiles (5).

    De concessions en concessions

    Les juifs parurent satisfaits pendant quelques temps, puis formulèrent de nouvelles exigences. Il y eut la visite de Jean-Paul II à la synagogue de Rome où le pape eut une attitude et des paroles complaisantes. Il y eut l'affaire du Carmel d'Auschwitz, qui déplaît tant aux juifs bien que situé loin du camp de la Shoah ; il en coûtera 100 000 dollars au Vatican pour reloger les religieuses dans un coin d'un futur centre oecuménique.

    Le cardinal Ratzinger a indiqué, l'automne dernier, que l'on avait demandé la collaboration d'experts juifs pour la rédaction du futur "catéchisme universel" dont on veut faire un instrument de dialogue et dont les israélites réclament que, avec la Formation des prêtres et la liturgie, il participe à la lutte contre l'antisémitisme.

    Une réunion tenue les 5 et 6 décembre suivant en présence du pape par les délégués du Comité juif international et ceux de la commission pontificale pour les rapports avec le judaïsme, a précisé les revendications israélites. A savoir : d'abord une déclaration du Vatican sur la Shoah, déclaration en cours de rédaction et qui incriminera certaines traditions catholiques venues des Pères de l'Eglise. Puis, entre autres, la reconnaissance de l'Etat d'Israël et la demande d'annulation de la déclaration par laquelle l'ONU, en 1975, assimilait le sionisme à un racisme.

    Sans solution

    Le Vatican ne semble pas vouloir céder sur ce dernier point pourtant accepté par les évêques américains. Quant à la reconnaissance d'Israël, réclamée de nouveau en janvier par le grand rabbin de Rome, le pape a fait répondre que , s'il ne conteste pas l'existence de cet Etat, il ne peut envisager une représentation diplomatique tant que ne seront pas réglés le problème palestinien et lle statut international de Jérusalem.

    Il faut comprendre que l'oecuménisme conciliaire se trouve là coincé entre les exigences des juifs et celles des musulmans. Déjà le texte de Nostra aetate adopté, nous venons de le voir, par Vatican II en 1964 avait soulevé des protestations islamiques. Des protestations si menaçantes que les mêmes "pères conciliaires" avaient remplacé en 1965 ce premier texte par un autre notablement édulcoré. C'est à croire que l'Esprit qui inspirait, affirme-t-on volontiers, le Concile, avait soufflé un peu trop fort la première fois. Bien que le nouveau texte restât satisfaisant pour les juifs, le cardinal Bea se précipita à New-York pour présenter ses excuses à leurs instances internationales.

    Le cardinal Decourtray, qui se sent, dit-il, de sensibilité juive, a déclaire en novembre qu'il valait mieux, dans le conflit du Golfe, "la guerre plutôt que le déshonneur". Ce qui ne pouvait plaire aux musulmans. Est-ce pour cela qu'il s'est trouvé peu après remplacé à la tête de l'épiscopat français par Mgr Duval, neveu du fameux archevêque d'Alger surnommé Ben Duval en raison de son amitiés pour le FLN ? Toujours est-il que Mgr Duval crut opportun de déclarer : "Entre ne rien dire et parler trop vite, il y à une place pour une parole qui soit vraiment utile à la mission de l'Eglise".

    Tout cela est bien délicat, mais le Vatican a réussi à mettre d'accord juifs et musulmans. Contre lui.  En envisageant de béatifier en 1992 la grande reine d'Espagne Isabelle la Catholique, protectrice de Christophe Colom qui, chacun le sait, découvrit l'Amérique en 1492. Or il se trouve que, cette même année 1492, la même reine acheva de chasser les arabes d'Espagne en conquérant le royaume de Grenade. Et que, toujours en 1492, elle ordonna l'expulsion des juifs de Castille, pour des motifs d'ailleurs purement religieux.

    Les protestations fusent de tous côtés. Elles viennent du grand rabbin de Rome. Et aussi, en janvier, à la fois d'une société islamique britannique, qui estime qu'Isabelle était plutôt un démon qu'une sainte, et d'une commission épiscopale, tout aussi britannique, spécialisée dans les relations judéo-catholiques. Le journal La Croix s'en même aussi : il penche plutôt vers l'Etoile que vers le Croissant. On en est là.

    Bref, l'oecuménisme, ce n'est pas simple.

    Osons une suggestion. Stupide, bien entendu. Celle-ci : et si l'Eglise laissait juifs et musulmans à leurs problèmes et s'occupait plutôt des catholiques .

    Daniel Raffard de Brienne

    (1) D. Judant, Judaïsme et christianisme, Ed. du Cèdre, 1969

    (2) Père J. Bonsirven, Textes rabbiniques des deux premiers siècles chrétiens, Instituto Biblico, n°5, Rome, 1955

    (3) Id, au n° 1753

    (4) La Documentation catholique, juillet 1988

    (5) Père Ralph M. Wiltgen, Le Rhin se jette dans le Tibre, ed. du Cèdre, 1975 (actuellement aux éditions Martin Morin : livre indispensable à toute personne désireuse de connaitre au moins une partie des dessous de Vatican II.

    Article paru dans Le Choc du mois, n°38, mars 1991, p. 39-40

  • Un conférencier infatigable

    3e79e8ab86aad87d3c7eae0e8b8c6f04.jpgRares sont les écrivains qui auront animé autant de conférences que le fit Daniel Raffard de Brienne. Convaincu que l'écrit ne suffisait pas à son action militante, il multiplia les conférences dans toute la France, en Martinique, en Italie, en Ukraine, en Pologne et dans tant d'autres endroits. La parole appuyant l'écrit et surtout lui permettant un contact direct avec ses lecteurs, il pouvait ainsi répondre aux nombreuses questions des auditeurs et parer, en direct, aux principales objections de quelques rares contradicteurs.

    Il mena donc des centaines de conférences sur les thèmes majeurs de son oeuvre - Saint Suaire, évolutionnisme, la messe - mais aussi sur de nombreux sujets que son érudition lui avait permis d'embrasser puis de maîtriser.

    Son livre de souvenirs, Droit vers l'azur, relate l'activité intense de ce militant du bien commun. Toute sa vie fut animée par le souci d'agir en vue du bien commun et il ne pouvait concevoir une vie sans le souci d'agir pour lui donner un sens et de lutter en permanence pour que la vérité triomphe de l'erreur et le bien du mal. Il s'étonnait toujours de la vacuité de beaucoup de nos contemporains et des futilités qui semblent les animer. Dans Droit vers l'azur, il nous offre, sans que ce soit le but de l'ouvrage, le modèle de ce que peut être une vie vouée à la vérité et au farouche besoin de la transmettre.

  • L'Action Catholique

    36cafcefa57186032314f33323f308cb.jpgChacun connait plus ou moins la puissante Action Catholique, véritable fédération de mouvements créés par l'Eglise, sous le pontificat de Pie XI pour impliquer les laïcs dans la diffusion  de la doctrine humaniste de l'Eglise et du catholicisme social.

    En dix chapitres denses, Daniel Raffard de Brienne livre, dans une plaquette éditée par Renaissance Catholique et malheureusement aujourd'hui épuisée, l'histoire et les malheureuses dérives de cette organisation, fondée sur la base de principes généreux mais qui n'évita aucun des écueils de l'époque et devint même le collecteur des erreurs les plus graves du siècle : le progressisme et le "marxisme chrétien". A ce titre, Daniel Raffard de Brienne ne craint pas d'écrire que "l'Action Catholique a accompagné et même précédé le glissement de l'Eglise".

    Avant de livrer à nos lecteurs la conclusion de cette plaquette, nous citerons l'intitulé des chapitres afin de bien montrer le cheminement intellectuel qui y conduit.

    1 - La doctrine des deux glaives

    2 - La pratique des deux glaives

    3 - Le libéralisme à la conquête de l'Eglise

    4 - Saint Pie X redresse la barre

    5 - L'élimination des traditionnalistes

    6 - La naissance de l'Action Catholique

    7 - Le développement de l'Action Catholique

    8 - Pie XII et l'Action Catholique

    9 - L'Action Catholique en France à partir de Pie XII

    10 -  Les principes de l'Action Catholique.

    Conclusion

    Née d'une intention généreuse et fondée sur des principes que l'on croyait nouveaux mais qui n'étaient pas innocents, l'Action Catholique n'a pas répondu à l'attente. En appliquant les principes jusqu'à leurs pires conséquences, elle n'a pas réévangélisé le monde mais a aidé l'Eglise à se précipiter dans la crise.

    On n'aurait pas dû attendre un autre résultat. Pendant plus d'un siècle, les vagues révolutionnaires avaient battu les digues de l'Eglise. Puis, à travers les brèches ouvertes, elles s'étaient infiltrées, gagnant sans cesse du terrain au point d'inonder toute l'institution. c'est alors que l'on ne trouve rien de mieux que de faire appel à elles pour corriger leurs propres effets.

    On avait voulu faire de l'Action Catholique une arme révolutionnaire contre la Révolution. On avait voulu opposer la démocratie et le socialisme chrétiens à la démocratie et au socialisme antichrétiens, comme si l'antichristianisme ne venait pas justement de la démocratie et du socialisme en eux-mêmes. On avait oublié que, selon la juste remarque de Joseph de Maistre, la Contre-Révolution n'est pas une révolution contraire mais le contraire de la Révolution.

    A la fois cause et conséquence, et en tout cas relais de la révolution dans l'Eglise, l'Action Catholique a contribué au triomphe de Vatican II. Pour réparer les dégâts, il ne suffira pas d'en oublier le nom qui fut, on l'a vue, synonyme d'action populaire chrétienne et donc de démocratie chrétienne, avant même Pie XI. Il faudra aussi agir en sens contraire.

    C'est ainsi qu'il faudra restaurer l'autorité des évêques et des curés et regrouper les oeuvre catholiques dans les diocèses et les paroisses, en éliminant autant que nécessaire les fausses hiérarchies, même et surtout religieuses et cléricales.

    Il faudra aussi rendre au sacerdoce toute sa dignité et tout le respect qui lui revient. Les vocations refleuriront lorsque le prêtre aura retrouvé son identité en redevenant l'autre Christ, le seul dispensateur des moyens spirituels, à l'exclusion d'une participation indue des laïcs à qui il laissera, sous son contrôle doctrinal et moral, la responsabilité des moyens temporels de leur propre apostolat.

    "Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu".