Son oeuvre
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L'islam et les femmes
Jamais le droit des femmes et leur dignité n'a tant préoccupé nos contemporains. Pourtant, la mondialisation, le terrorisme et l'émergence de l'intolérance islamiste mettent en relief les injustices et les crimes qui frappent nombre d'entre elles à travers le monde. L'islam prône-t-il la discrimination sexuelle ? Réduit-il le statut des femmes à celui de mineure à vie ? Prescrit-il le port du voile ? Réprime-t-il par la violence l'insoumission à l'homme ? Punit-il l'adultère par lapidation ? Pratique-t-il la spoliation partielle de leur héritage ?Feu le Président de l'Association des Écrivains Catholiques de langue française, Daniel Raffard de Brienne, établit ici ce que dit le Coran et professe Mahomet sur les femmes.Editions Viaromana, 2007 -
Les lettres martiennes
Gastronomie
Ma bonne amie, alors que comme nous les Terriens ne se livrent à la plupart des actes physiologiques que dans le secret de leur intimité, il en est un qu'ils ne craignent pas d'étaler en public sans la moindre pudeur : c'est l'alimentation. Il existe même des établissements spécialisés, que l'on appelle des "restaurants", où cela se fait en commun.
Les Terriens qui m'accueillent m'emmènent parfois dans ces restaurants et j'avoue qu'une fois dissipée ma gêne j'y ai pris goût. C'est donc avec joie que j'ai accepté de me rendre dans une maison dont je ne parviens pas à prononcer le nom. "C'est un nom écossais", m'a-t-on expliqué.
L'Ecosse est une petite région terrienne dont la cuisine jouit d'une réputation flatteuse. On y prépare de la panse de brebis farcie. "Lorsque l'on m'en a servi", m'a dit un Terrien, "j'ai cru que c'était de la merde ; quand je l'ai mangée j'ai regretté que ce n'en fût pas". C'est vous dire que la merde doit être un plat particulièrement fin et délectable. J'ai hâte d'y goûter.
Il y à peu, l'on m'a invité dans un celèbre restaurant et je me suis régalé. Lorsque le cuisinier (un certain Bokuz, je crois) s'est approché de notre table, je lui ai dit, de mon mieux, que sa nourriture valait la merde. Je me suis retrouvé assis sur le trottoir, preuve que les artistes de la casserole n'aiment pas les compliments. Bien que de manifestation un peu rude, je prise assez cette humilité.
Mais j'en reviens à mon restaurant écossais, qui paraît-il n'est pas écossais, mais américain, ce qui n'a pas laissé de m'inquiéter. Les Américains seraient assez primitifs, car, à en croire un Terrien, "c'est le seul peuple qui ait glissé de la barbarie à la décadence sans passer par la civilisation". Cette peuplade aurait été découverte par un certain Colomb dont le rôle paraiît controversé : il a bien agi selon les uns, mais d'après les autres il aurait mieux fait de se casser une jambe. Petite parenthèse : les Terriens n'ont que deux jambes comme vous et moi, et ce ne sont pas de petits hommes verts comme on le raconte chez nous. On en voit de toutes les couleurs. Mais pas des verts.
Nous nous sommes donc rendus à l'établissement américain en question et là on nous a vendu très cher des petits "gadgets" en plastique. En prime on nous a remis un carton qui contenait des frites desséchées et diverses choses ni identifiables ni à première vue comestibles.
Assez embarassé par ces objets dont l'utilité ne m'apparaissait pas, j'ai trouvé une place sur un coin de table et un bout de banquette. Et j'ai attendu le maître d'hôtel et sa carte. Je les ai attendu longtemps. En vain.
J'ai alors regardé comment s'y prenaient les autres clients. Eh bien, il avaient perdu patience et avalaient le contenu de leurs cartons ! Ils ne paraissaient pourtant pas vraiment affamés.
En réalité, la plupart d'entre eux étaient des enfants. Sans doute subissaient-ils une punition : "Si tu n'es pas sage, tu iras déjeuner chez..." (je n'arrive toujours pas à prononcer le nom).
Cela semble bien sévère. Quant à l'homme qui m'avait amené là, c'est un farceur. Ca se passe comme ça chez les Terriens.
Daniel Raffard de Brienne
(Extrait de "Les lettres martiennes", éditions de Chiré, 1995)
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Serge de Beketch commente "Droit vers l'azur"
Souvenirs d'un monde perdu
Est-ce une affaire de génération ? Plus je vieillis et plus j'aime les mémoires, journaux intimes, et souvenirs alors que le plaisir de la fiction s'évanouit doucement.
J'ai donc ouvert avec une gourmande impatience "Droit vers l'azur" de notre ami Daniel Raffard de Brienne, joliment préfacé par un autre ami, Vladimir Volkoff et non moins joliment édité par les éditions Consep sous une couverture dont l'illustration élégante évoque à merveille la beauté voilée dela campagne picarde. C'est toujours une étrange expérience de lire les mémoires de quelqu'un que l'on connait. Où plus précisément que l'on croît connaître.
Avec Daniel Raffard de Brienne, cette expérience se complique d'un véritable voyage dans le temps. Comment croire, en effet, que l'ami que l'on a devant soi a été, il y à une septantaine, un galopin vêtu d'un "petit ensemble de venours ou d'un costume marin porté avec le béret assorti (et), l'hiver, des guêtres en cuir souple que l'on boutonnait jusqu'aux cuisses à l'aide d'un crochet."
Ainsi ce costume que l'on croirait sorti d'une illustration d'Emile Bayard pour un roman de la Comtesse de Ségur était encore porté par les enfants sages un siècle après "Jean qui pleure et Jean qui rit" ?
Comment imaginer la rue de son enfance : "une circulation assez réduite : le tramway qui traversait la place, le tombereau à cheval où les barocheurs vidaient les poubelles avec des voitures hippomobiles ou à moteur (...) un montreur d'ours qui y exhibait son animal".
C'est vraiment un autre monde qui renaît sous nos yeux. Un monde d'un autre siècle et d'un autre pays mais que nous pouvons presque toucher puique ceux qui l'ont vécu y tiennent encore. Songe-t-on aux séismes intellectuels, psychologiques, moraux qu'on pu provoquer chez nos aînés le basculement de cette bonne société du plat pays encore toute pétrie de tradition dans notre chaos barbare ?
Passer du "barocheur" ch'timi vidant sa poubelle dans un tombereau au coin d'une rue déserte de Saint-Quentin au bambara affublé d'une combinaison fluorescente qui pousse un levier pour hisser un conteneur en plastique jusqu'aux entrailles d'un énorme camion-benne hurlant de tous ses moteurs dans une cité des territoires occupés, est-ce vraiment ça le progrès ?
Raffard de Brienne a, en tous cas, traversé les orages du temps sans perdre le sourire. Et ce n'est pas le moindre charme de son livre que cet esprit si français qui imprègne chacune de ses pages, que cette réserve qi discrète qui voile les épisodes tragiques (et ils ne manquent pas) que cette modestie si assurée qui esquive à chaque instant l'autocélébration et que cette franchise bonhomme qui nous offre l'amusement roboratif de quelques coups de pieds au culte de la personnalité.
Là encore, on a l'impression de découvrir un autre monde, une autre société, d'autre moeurs. Des gens bien élevés n'imposant ni leurs humeurs ni leurs chagrins mais ne courbant pas pour autant l'échine et ne mettant à leur langue que le frein de la courtoisie.
A des années-lumières du mur des lamentations qui est aujourd'hui l'élément principal de l'architecture sociale.
Ainsi suivons-nous avec bonheur le vagabondage de Raffard à travers sa propre vie, l'enfance, la guerre et le cauchemar des bombardements où le jeune scout charrie, des jours durant, des cadavres démembrés, les débuts du militant royaliste dans le remuement d'après-guerre, les joies et les peines de la vie de famille, l'engagement catholique, la crise de l'Eglise, et le combat inlassable, déterminé, on pourrait dire presque héroïque pour la gloire du saint Suaire de Turin (quel signe de contradiction, encore, quel sujet de méditation que le dévouement de cet homme qu'un enchaînement presque préternaturel d'accidents a quasiment privé de la vue et qui s'est fait le hérault de l'évangile par l'image !).
Et toujours ce style français, cette "distanciation" pleine de l'humilité blagueuse qui est sans doute le trait dominant du caractère de Daniel Raffard de Brienne.
Vraiment, ce livre est un petit bonheur.
Serge de Beketch (Le libre Journal n° 305 du 30 octobre 2003)
Droit vers l'azur
Préface de Vladimir Volkoff
Editions Consep
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Lex orandi
Publiée en 1983, cette étude sur la Nouvelle Messe et la Foi demeure l'une des synthèses les plus claires et les mieux documentées sur le sujet. En voici le texte intégral.
Il est encore possible de se procurer des exemplaires de ce numéro spécial de Lecture et Tradition auprès de Diffusion de la Pensée Française à Chiré-en-Montreuil.
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Faites l'humour...pas la polémique
Entre deux sujets très sérieux dans lesquels il laissait libre cours à son érudition et sa vaste culture, Daniel Raffard de Brienne ne se privait jamais d'un bon mot ou d'un calembour. Il écrivit même, en 1992, un petit livre au titre évocateur "Faites l'humour... pas la polémique, véritable condensé d'humour et d'ironie, dans lequel il présente des documents et dialogues imaginaires et commente avec une verve décapante certains petits faits vrais cueillis au jour le jour.
Nous avons choisi l'article consacré au curé des loubards, figure légendaire et curieuse du paysage clérical français.
Le curé des loubards
Il est devant nous, tel que nous l'imaginions : santiags à bouts pointus et talons hauts, djine collant, blouson clouté et chaîne au cou. Tout de suite nous commençons l'interview.
- Mon Père, ou peut-être dois-je dire : Monsieur l'abbé ?
- Commence pas à déc..., mec. Mes potes m'appellent Robert.
- Ah ! très bien. Donc, euh ! Robert, vous vous consacrez au même ministère que l'abbé, je veux dire Guy Gilbert.
- Mouais. Sauf qu'il jaspine trop façon curé. A part quand il engueule une rombière à la télé. Avec les gonzesses de la télé, faut faire peuple, elles aiment ça de s'encanailler. J'ai lu sur La Voix du Nord que le Gilbert, y sort les mêmes vannes depuis dix ans : "Rachid arrêté à 300 mètres de chez moi" ou "cette courée de Roubaix où les rats sont plus gros que les chats". Il a donc rien vu depuis.
- Vous avez en commun la même tenue vestimentaire. C'est à croire que vous appartenez à une même congrégation (petit rire fin).
- Charrie pas, mec. Faut bien se nipper comme les zigs qu'on veut travailler avec eux. Faut se fondre dans le milieu.
- Si je vous suis, il faudrait donc que chaque prêtre adoptât un costume et un comportement spécifiques selon le milieu où il exerçait son ministère. On pourrait ainsi voir des prêtres habilllés en commis bouchers ou en P.D.G.
- Rigole pas. T'as qu'à viser à la télé l'assemblée des évêques de Lourdes. Y en a tout un pacson style petits retraités des postes : costard avachi et bérêt enfoncé jusqu'aux étagères à clopes. Mais t'en as d'autres fringués pédégés sovieto-capitalistes : falzar façon mylord et chapka à la Popov. Y portent des attaché-cases cousus main, que tu te dis qu'ils y mettent des fafs vachement importants. Mais quand tu vois leurs discussions, tu piges qu'ils y rangent que leur casse-dalle : le picrate et le calendo.
Et puis moi au moin je me nippe. J'ai lu il y à quelques années qu'il y avait des curés chez les nudistes. Ouais, mec. Je sais même pas s'y mettaient l'étole pour célébrer.
- Il n'en reste pas moins que votre tenue, au demeurant fort intéressante, doit quelque peu surprendre dans les églises (petit gloussement distingué).
- Mais qu'est-ce qu'y veut que je foute dans les églises. C'est pas là qu'y vont mes potes, surtout depuis qu'y a pu que peau de balle dans les troncs.
- Cependant, vous qui êtes prêtre malgré tout, parvenez-vous à vous faire respecter de vos, de vos potes comme vous dites ?
- Je veux. Au début, y faut quelque fois dérouiller. Quelques marrons. Ou une paire de mandales : joue gauche, joue droite, comme dans l'Evangile. Sauf qu'y faut donner et pas recevoir.
- Votre apostolat si attachant vous procure-t'il des résultats satisfaisants ?
- Pour ça, ouais. Je leur montre qu'ils ont beau être des paumés, c'est quand même des hommes et qu'y doivent défendre leurs droits.
- Obtenez-vous de véritables conversions ?
- Des quoi ? Non, mais y me cherche, y se fout de ma gueule, ce c... D'abord des conversions à quoi ? Des conversions pourquoi ? Tu sais donc pas que ça se fait plus depuis Vaticandeux ? L'oecuménisme, tu connais pas ?
Allez, laisse tomber et enfile-toi plutôt un gorgeon de rouquin. Prends la boutanche. T'as qu'à essuyer le goulot avec ta manche.
Voilà.... c'est à peine exagéré, quand on a vu ou entendu le "curé des loubards". Les trente-huit articles qui composent ce petit recueil sont du même tabac, avec des titres tels que :"Testez votre foi", "Une prière polyglotte", "Gays, marions-nous" ou "Mesdames les co-curés", par exemple. Il existe encore quelques exemplaires disponibles de cet ouvrage dont voici les références:
Daniel Raffard de Brienne, Faites l'humour... pas la polémique, éditions de Chiré, 1992
SA Diffusion de la Pensée Française, Hameau Rigault, La Caillauderie, 86190 Chiré-en-Montreuil
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Le dictionnaire des Reliques de la Passion
Daniel Raffard de Brienne alors président de l'Association des Ecrivains Catholiques de langue française a réuni ici l'ensemble des informations connues et parfois inédites concernant les principales reliques de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ : Linceul de Turin, Lance de Saint Longin, Tunique d'Argenteuil, Couronne d'épines, Saints clous...
Un index des noms de personnes et de lieux fait de cet ensemble un précieux outil de recherche sous forme alphabétique et encyclopédique.
Voici donc la synthèse d'une abondante documentation aux interprétrations parfois diverses et contradictoires, réalisées dans une double fidélité aux exigences de la science et de la Foi.
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Les charismatiques après la fête
Dans cet ouvrage sur le mouvement charismatique, Daniel Raffard de Brienne démontre les dérives et dangers de cette mouvance chrétienne dont beaucoup parlent et que bien peu connaissent réellement. Sans esprit de dénigrement mais avec parfois de redoutables pointes d'humour, il nous livre une analyse sans concession de cette pratique aujourd'hui fort répandue.
Dans Monde et Vie de janvier 2002, année de la publication de l'ouvrage, Michèle Reboul en fait une recension très didactique dont l'intérêt demeure entier quelques années après.
"Daniel Raffard de Brienne intitule son dernier livre parue dans la collection "Objections" des éd. Servir, fondées par l'abbé de Tanouärn, de la Fraternité St Pie X, Les charismatiques après la fête (1). son livre, de vulgarisation, est un résumé simple et clair, sur le sujet et sur l'apparition charismatique de Medjugorje.
Pourquoi ce titre bien choisi, "Les charismatiques après la fête" ? Parce que les fausses lumières n'éclairent pas et que les charismatiques ont choisi le clinquant, les paillettes et l'extériorisation du sensible, de l'affectif, au détriment de la Vraie Lumière qui ne se fait connaitre que de nuit, dans la nuit de l'âme et des sens. Saint Jean de la Croix disait dans "la nuit obscure" : "Plus la lumière et la clarté de Dieu sont élevées, plus elles sont ténèbres profondes pour l'homme" (cité p.100 dans St Jean de la Croix et la nuit mystique, d'Yvonne Pellé-Douel, coll. Maîtres spirituels, Seuil).
Les origines du Renouveau charismatique
Dans ses deux premiers chapitres, "Le Renouveau charismatique face à l'histoire de l'Eglise" et "Le Renouveau charismatique et la mentalité contemporaine", R. de Brienne montre que si le pentecôtisme, dit "catholique" (premier nom du mouvement charismatique) a commencé en 1967, donc après le concile Vatican II (1962-1965), c'est à la fois par réaction et par conséquence naturelle, logique. Le charismatisme est, en effet, une réaction contre ce que R. de Brienne ne craint plus d'appeler "le saccage de la liturgie" (p.23), accompagné par une relativisation des vérités de la foi, une religion "démythifiée, c'est-à-dire débarassée autant qu'il est possible du surnaturel" (p.25). C'est aussi une conséquence logique de la liberté religieuse et de l'oecuménisme prônés au Concile. L'abaissement doctrinal de l'Eglise conciliaire est tel que cela ne la gêne pas du tout - mais lui plaît au contraire - que le charismatisme, le mouvement le plus important de l'Eglise actuelle et le plus loué, avec l'Opus Dei, par Jean-Paul II, provienne non seulement du protestantisme mais d'une déviation de celui-ci : le pentecôtisme, lui-même dérivé du baptisme.
Car le pentecôtisme a été fondé en 1906 par des baptistes et un pasteur méthodiste, Charles Parham. Il appelle son mouvement "pentecôtisme, car il veut réveiller les dons que l'Esprit Saint a communiqués en plénitude aux apôtres le jour de la Pentecôte. Outre que c'est refuser à Dieu d'être le libre auteur de ses dons, propres à chacun, faire croire qu'il peut y avoir une "nouvelle Pentecôte" comme le voulait Marthe Robin avec Jean XXIII, c'est penser que l'unique Pentecôte était insuffisante, comme sont insuffisants, pour les charismatiques, le baptême et la confirmation, puisqu'il faut les revivifier par le "baptême de l'Exprit".
Les pentecôtistes pratiquent, comme les protestants, la libre interprétation de la Bible, alors que dans la véritable Eglise, celle d'avant Vatican II, seul le magistère de l'Eglise était garant de la Vérité et donc du sens de la Bible, de la Révélation. Mais ils en diffèrent par leur croyance au "baptême de l'Esprit" qu'ils conçoivent comme une nouvelle Pentecôte et dont la réception est confirmée par différents charismes : don des langues, de guérison, de prophétie, etc.
Tout commença au début de 1967 où quatre laïcs, dont deux professeurs de la faculté théologique de l'université Duquesne à Pittsburg aux USA, Ralph Keller et Patrick Bourgeois, demandèrent à recevoir par des pentecôtistes, un baptême dans l'Esprit. Ils avaient lu l'année précédente un livre où K. et D. Ranaghan en parlaient (Le retour de l'Esprit), éd. du Cerf, 1974) et crurent, comme ces auteurs, que le baptême dans l'Esprit revivifierait leur vie chrétienne. Ils n'ont pas pensé qu'ils ne pourraient sortir de leur tiédeur qu'en brûlant d'amour de Dieu, qu'en devenant des saints, et que cet amour de Dieu et des autres en Dieu serait vivifié par la prière,la communion, la confession, les oeuvres de miséricorde,la lecture spirituelle, etc.
Ces catholiques ont donc été demander aux protestants (l'idée ne leur serait jamais venue avant Vatican II !) de leur imposer les mains (geste que fait un évêque en ordonnant un prêtre). Aussitôt ils se sentirent "baignés" du Saint Esprit (selon leur expression qui fit naître celle d'"effusion de l'Esprit") et se mirent à parler en langues. Aussitôt ces laïcs vont imposer les mains à ceux qui le leur demandaient et le mouvement s'étendit, avec une rapidité étonnante, des universités aux couvents et aux paroisses (iln'y en à presque pas qui n'ait son groupe de prière charismatique).
Il y aurait actuellement 70 millions de charismatiques catholiques dans le monde et 400 millions en tout (avec les nombreuses confessions protestantes ; les orthodoxes ont une trop juste conception du Saint Esprit pour en faire partie). 40 000 charismatiques catholiques sont répartis en France dans une trentaine de communautés, la plus importante étant l'Emmanuel (près de 7000 fidèles avec 140 prêtres), mais aussi "Le Chemin Neuf", très lié au protestantisme, et les Béatitudes, appelé auparavant "Lion de Juda", mouvement plus juif que catholique. Leurs disciples fêtent le sabbat en plus du dimanche, dansent les danses juives des Hassidim, étudient le Talmud, très hostile à Notre Seigneur et à la Sainte Vierge, et les midrachim, commentaires rabbiniques de l'Ecriture.
Raffard de Brienne signale d'ailleurs dans son chapitre "Les communautés françaises et le Renouveau charismatique" qu'ils se reportent au texte hébreu de la Bible "alors que ce texte a été modifié par les Juifs devant le développement du christianisme" (p.68) (voir à ce sujet son livre La Bible trahie ?) (2). On ne peut pas à la fois croire que le Christ est venu (c'est le dogme de l'Incarnation du Verbe de Dieu) et prier avec les juifs pour demander la venue du Messie. De plus, leur conception du Messie temporel, puissant, à l'opposé de celle des chrétiens pour qui le Messie est le "Serviteur souffrant" d'Isaïe (p.53) "sans beauté ni éclat pour attirer nos regards... objet de mépris, abandonné des hommes... ce sont nos souffrances qu'il portait et nos douleurs dont il était chargé".
L'effusion de l'Esprit
Malgré son origine prostestante, le charismatisme, mouvement le plus important de l'Eglise conciliaire, inspirateur de nouvelles communautés (Focolari, Communion et Libération, les Foyers de charité...), pourrait être, peut-on penser, de remettre à l'honneur ce qui, après Vatican II, avait souvent disparu : la direction spirituelle, la confession individuelle, la prière centrée sur l'oraison, l'adoration au Saint Sacrement, le chapelet, etc. Le charismatisme est loué par les autorités ecclésiastiques, car il a permis que de nombreux jeunes, attirés par ce qui est sensible, sensuel et affectif, ne se dévoient pas dans les sectes et ne participent pas aux courants traditionnels comme ceux de la Fraternité Saint Pie X, rejetée par les évêques, car Mgr Lefebvre était opposé aux déviations de la foi et aux changements désastreux de la liturgie qui se sont imposés dans l'Eglise depuis le Concile : liberté religieuse, oecuménisme, nouvelle messe, nouveaux sacrements...
Ce qui fait la spécifictié du charismatisme, ce ne sont pas les dévotions traditionnelles qui furent au coeur de l'Eglise bimillénaire et sont des appâts pour attirer ceux qui s'ennuient dans les liturgies de la Parole et dans une Eglise desséchée où il n'y à plus ni mystère ni sacré car l'homme y a remplacé Dieu. Ce qui fait la spécificité, le coeur, du charismatique, c'est l'effusion de l'esprit appelée auparavant "baptême de l'Esprit". Là encore, le changement d'appellation est destiné à occulter la réalité du fait, même si, remarque R. de Brienne, "les deux expressions ne sont pas synonymes [car] le baptême dans l'Esprit, c'est l'acte et l'effusion de l'Esprit, son effet". (p.77)
Le baptême dans l'Esprit par imposition des mains, apparu à la fin du XIXe siècle, se fait généralement par des laïcs qui l'ont reçu, eux aussi. Il s'agit d'une initiation par des initiés ou d'une transmission du "sacrement du diable" comme disait le P. Catry. René Guénon (1886-1951), gnostique, franc-maçon (33e degré du rite écossais et 90e du rite égyptien de Memphis-Hisraïm) et musulman dans une confrérie soufie (à partir de 1912) et donc connaisseur en initiations, précisait dans ses Aperçus sur l'initiation : "Le rite est toujours efficace quand il est accompli régulièrement. Peu importe que son effet soit immédiat ou différé. Il vaut toujours et ne se renouvelle jamais."
Le baptême dans l'Esprit, supposé revivifier les grâces du baptême et de la confirmation, réduit l'importance de ces sacrements qui sont uniques car ils agissent "ex opere operato", "par leur puissance" et la vie chrétienne en est le fruit. Ce "baptême" affaiblit aussi le rôle du prêtre au profit des initiateurs, généralement laïcs et de leurs chefs, les bergers, à qui ils doivent une soumission totale, même pour les décisions de la vie familiale (avoir ou non un autre enfant, choix du lieu des vacances, etc.). Et l'effet de ce baptême, l'effusion de l'Esprit, est immédiate ou différée mais elle arrive toujours, comme l'avait observé René Guénon.
En quoi consiste cette effusion ? En une sensation non seulement sensible mais charnelle de ce qu'ils disent être le Saint Esprit (mais pourrait être l'Esprit du Mal). Au lieu de donner de véritables charismes, c'est-à-dire des grâces (charis = grâce) pour la conversion, la sanctification d'autrui, le bien de l'Eglise, cet "Esprit" produit des effets spectaculaires, inutiles et même souvent nocifs. Le signe principal que le charismatique a bien reçu l'Esprit est, en effet, le chant en langues : c'est une glossolalie, une énonciation involontaire de syllabes dans aucune signification.
Or jusqu'à l'intrusion du mouvement charismatique dans l'Eglise, ces sons privés de sens n'étient proférés que par les quakers, les méthodistes, les adeptes des "revivals" et... les possédés du démon. D'ailleurs, il est intéressant de constater que certaines personnes, au moment où elles reçoivent le baptême dans l'Esprit, tombent en transe ou bien ont une paix intérieure et un ravissement ineffable. On observe le même effet après la prise de drogues hallucinogènes, tele le LSD, ou dans le cas d'initiations où le démon envoûte l'âme (vaudou, méditation transcendentale...).
Quant au don des langues, il n'est en rien semblable à celui qu'avaient reçu les apôtres. Ceux-ci comprenaient leurs interlocuteurs et leur parlaient dans leur langue (Actes 2, 4-11) alors que les charismatiques en sont incapables et ne comprennent pas ce qu'ils disent. Ceux qui connaissent les langues rares dans lesquelles s'expriment les charismatiques (l'amahrique, l'araméen, etc.) affirment qu'ils profèrent souvent des blasphèmes alors qu'ils croient louer Notre Seigneur ou la Sainte Vierge. Et en ce qui concerne les prétendus charismes de guérison, R. de Brienne remarque qu'elles "ne font jamais l'objet de contrôles" (p.10).
Et puis, comment ne pas s'étonner que l'Esprit Saint qui est l'Esprit de Vérité, l'Intelligence même, s'exprime en sons inintelligibles, peu propres à enseigner la foi et à convertir, contrairement au don des langues étrangères reçu par les apôtres ? Et pourquoi l'Esprit Saint produirait-il un effet différent chez l'initié charismatique et chez le baptisé ou confirmé, enfant ou adulte, qui n'entre pas en transe et ne chante pas en langues ? Enfin, n'oublions pas que les mystiques ont toujours mis en garde contre la recherche sensible et parfois quasiment sensuelle des grâces du Saint Esprit.
Saint Jean de la Croix recommandait : "Que l'âme s'applique, non à ce qui est plus savoureux, mais à ce qui plus insipide ; non à ce qui plaît mais à ce qui déplaît" (Montée du Carmel, Livre I, cha. 13, p.135 dans Y. Pellé-Douël, id). Et Raffard de Brienne cite, p.80, St François de Sales : "Il y à des âmes qui se veulent, à ce qu'elles disent, être conduites par l'Esprit de Dieu, et il leur semble que tout ce qu'elles imaginent sont des inspirations et des mouvements du Saint-Esprit... en quoi elles se trompent fort !" (Les vrais entretiens spirituels, 12e entretien).
Daniel Raffard de Brienne n'oublie pas le rôle de Marthe Robin dans l'édification des communautés charismatiques et a un très intéressant chapitre sur l'apparition charismatique de Medjugorje qu'il qualifie, fort justement, de "grandiose caricature de Fatima" (p. 111) : message non conformes à la doctrine catholique, en particulier par leur oecuménisme délirant, mensonges répétés des voyants, désobéissance aux évêques et aux deux commissions diocésaines. La première, dirigée par Mgr Franic de 1982 à 1986 et la deuxième, de 1986 à 1990, sous l'autorité de la conférence épiscopale yougoslave, ont toutes deux déclaré qu'"il n'a pas été possible d'établir qu'il s'agisse d'apparitions ou de révélations surnaturelles" (p.119).
Et le successeur de Mgr Franic, Mgr Perice, remarque : "Il est défendu de prétendre... que Notre-Dame serait apparue ou apparaitraît encore à Medjugorje" (p. 120). R. de Brienne dit, à juste titre, que Medjugorje est "la vitrine du Renouveau charismatique catholique" (p. 121). Or de même qu'on ne voit pas pourquoi le Saint Esprit aurait accordé des charismes à des catholiques par l'intermédiaire de confessions prostestantes, "étrangères par définition à l'Eglise et donc éloignées de l'unique Vérité" (p. 96), de même pourquoi faudrait-il fonder une nouvelle Eglise, comme si l'Eglise catholique n'était pas celle fondée par Dieu, voulue par Dieu ?
Michèle Reboul
(1) Les charismatiques après la fête, Daniel Raffard de Brienne, éd. Servir, coll. Objections, 2001, 123 p.
(2) La Bible trahie ?, Daniel Raffard de Brienne, éd. Rémi Perrin. R. de Brienne a fait un additif à ce livre pour contester la Bible Bayard, "Nouvelle mouture de la Bible trahie".
A lire aussi l'excellent livre de l'abbé Denis Coiffet : Le Renouveau charismatique est-il d'Eglise ? (111 p., NEL)